Prenez rendez-vous avec le printemps
Longtemps, j’ai eu sous ma fenêtre un pommier, et c’était toujours un plaisir de guetter sur ses branches les prémices du printemps. D’abord timidement, juste un éclaircissement de sa silhouette, puis le blanc éclatant de ses fleurs entouré d’un vert de plus en plus vif.
Aujourd’hui, quand s’amorce l’aube de cette nouvelle saison, je prévois, si je le peux, une balade qui débouche sur un magnifique pré couvert de jonquilles et de narcisses. En veux-tu en voilà... Qu’elle qu’ai été la dureté du gel, on n’est jamais déçu.
Dans nos contrées tempérées, le cycle de la nature est marqué par les saisons. Que le printemps soit précoce ou tardif – une alternance qui a toujours existé –, nous avons cette chance de pouvoir assister à son éclosion. Comme ce personnage d’un roman de Jean Echenoz qui aime se laisser « aller à surveiller les signes du printemps – c’est toujours émouvant à observer, le printemps, même quand on commence à connaître le système, c’est une bonne façon de se changer les idées. »
Non...
seulement émouvant, mais aussi tellement beau et gai, quand toute une palette de couleurs embellit nos paysages. Cela a lieu chaque année et tout le monde peut s’y laisser prendre. Même si nous n’avons pas dédié une fête à ces moments-là, comme le font les Japonais qui se retrouvent sous les cerisiers en fleurs pour Hanami.
Car le printemps, c’est aussi réconfortant ! Voilà quelque chose qui revient toujours. Quelque chose qui fonctionne avec un ordre d’apparition bien réglé selon les espèces,de l’amandier pressé au pommier nonchalant. Certes, les changements climatiques passant par là, le calendrier s’en trouve un peu avancé, constatent les spécialistes de la phénologie. Mais chaque année, le même processus biologique se reproduit : la sève se remet à circuler, les bourgeons sortent de leur dormance et fleurissent... En quelques jours, avec une étonnante rapidité, les arbres reverdissent.
À chaque répétition du cycle, on a aussi implicitement l’impression que ce moment amène un renouveau, nous porte vers quelque chose de neuf. Serait-ce pour nous rappeler cette promesse originelle d’un certain Eden aujourd’hui menacé ?
Il me semble en tout cas que ce moment de l’année nous donne plus qu’un autre l’occasion d’être touché par les beautés de la nature. Il y a une forme de fraîcheur, de tendresse à même de séduire les plus blasés, de leur faire oublier que c’est du déjà-vu, du rebattu... Alors, consacrons lui un peu de notre temps. Et de la même façon que nous inscrivons dans nos agendas une exposition de peinture, un concert ou un opéra, prenons rendez-vous avec le printemps. Laissons-le nous enseigner l’art d’être subjugués par les métamorphoses naturelles.