Dossier
L’olfactothérapie pour se sentir mieux (1/3)
Forte des avancées de la recherche, les odeurs sont de plus en plus utilisées comme support de soin. Mémoire ravivée, humeur stabilisée, nausées soulagées... En milieu médicalisé ou dans le cadre d’une démarche de travail sur soi, elles contribuent à soulager en douceur les maux du corps et de l’âme.
La mémoire des odeurs
Alors que sort sur les grands écrans « L’Odorat », premier film documentaire entièrement consacré à l’exploration et la compréhension des odeurs, aux États-Unis et en Grande-Bretagne sont organisés de réjouissants et un brin provocateurs « smell dating», permettant à des personnes de se choisir en fonction de leurs odeurs corporelles. L’odorat est le seul de nos sens toujours en action tout au long de notre vie. Il s’éveille dès le ventre maternel – à trente semaines, le fœtus détecte de subtils changements olfactifs dans le liquide amniotique –, et reste sur le qui- vive en permanence. Même endormi, notre nez est prêt à nous signaler une odeur suspecte. Surprenant par sa puissance, l’être humain est capable de distinguer au moins 1 000 milliards d’odeurs, là où on l’avait longtemps cantonné à la perception d’à peine 10000.
D’un fonctionnement complexe, les mécanismes de l’odorat connaissent un éclairage majeur au début des années 1990. Des chercheurs américains révèlent ainsi l’existence de récepteurs olfactifs neuronaux, cellules sensorielles situées dans la muqueuse nasale. Une découverte saluée par le prix Nobel de physiologie et de...
médecine en 2004. Depuis, la recherche progresse, en particulier concernant l’impact des odeurs sur notre physiologie et notre psychisme. L’olfaction est ainsi le seul de nos sens à être en relation directe avec le cerveau limbique, siège des émotions et des souvenirs. Ainsi, une molécule odorante volatile, une fois inhalée, entre en contact avec les récepteurs olfactifs, lesquels produisent un influx nerveux véhiculé jusqu’au cerveau limbique, dont l’hypothalamus, qui gère les fonctions neurovégétatives et endocriniennes. Ce n’est qu’ensuite que l’information est traitée par le cortex, siège de la perception rationnelle. Influant sur notre système nerveux, l’odorat, associé à l’intuition, nous impacte d’abord de manière inconsciente. Et de sentir... à mieux se sentir, il y a un pas que de plus en plus de personnes choisissent de faire.
Huile essentielle précieuse
Camomille romaine (Chamaemelum nobile).
Précieuse en cas de choc émotionnel, d’hypersensibilité et de trac, elle apaise le système nerveux central, facilite le lâcher-prise et le repos. D’un point de vue subtil, elle aide à surmonter peurs et angoisses.
Alliances d’hier « Eaux » vertueuses à travers les siècles
Les parfums ont longtemps été au service de la médecine. On attribuait à certaines odeurs la capacité d’éloigner microbes et miasmes, une sorte de prophylaxie. Parmi les plus célèbres, l’Aqua Mirabilis, une « eau » parfumée à base de romarin, mélisse, bergamote et cédrat, était élaborée dans le couvent Santa Maria Novella de Florence. Elle visait à soigner divers maux en se frictionnant le corps. L’habileté de plusieurs générations de commerçants lui a même fait traverser les siècles : on trouve encore aujourd’hui l’eau de Cologne, ville où elle fut longtemps fabriquée. L’eau céleste, composée d’aigremoine, de jujube, de fenouil vert et de cannelle, est un autre exemple de cette alliance entre la parfumerie et la pharmacie qui durera jusqu’à la fin du 18e siècle.
Je me sens bien ! Ce n’est sans doute pas un hasard si le verbe sentir n’est pas uniquement lié au sens de l’olfaction, mais peut aussi exprimer un bien-être ou un mal-être physiologique. Les odeurs ont beau être invisibles, impalpables, elles influencent fortement nos émotions et nos ressentis profonds. Longtemps méprisé, l’odorat se révèle un outil à la fois puissant et subtil que l’on utilise de plus en plus dans les soins hospitaliers, mais aussi comme guide intime sur le chemin de notre intériorité et de notre épanouissement.