Au-delà des regrets
Alors que commence la nouvelle année, le passé prend parfois un goût amer. Les regrets donnent un sentiment d’incomplétude où se mêlent culpabilité et désespoir. Or déplorer ce que l’on a fait ou pas offre aussi l’opportunité de se construire. À condition de ne pas se laisser envahir par l’insatisfaction.
Joachim du Bellay, Édith Piaf, Alain Souchon… Si les poètes chantent autant le regret, c’est parce qu’il est souvent le ferment du vague à l’âme. L’étymologie du mot, issu de l’ancien scandinave « grâta », évoque un gémissement, une lamentation. Enclins à embellir ou à dramatiser le passé, on focalise sur le bon temps de sa jeunesse ou sur les ratés de son existence : un désir professionnel ou amoureux inassouvi, un choix qui a généré un imbroglio, une parole malheureuse prononcée ou ce trop peu de temps qu’on a consacré à ses proches. Déplorer nos actes ou une époque met en relief ce qu’on n’a pas fait… et par conséquent, ce qu’on aurait peut-être pu faire. C’est donc une sensation de manque qui crée un mécontentement ou un véritable chagrin. Certains regrets se diluent facilement dans le bouillonnement d’une vie active. Mais d’autres deviennent lancinants et parfois même obsédants, au point de nous empêcher de vivre pleinement heureux en abordant la vie du bon côté.
« Si je pouvais revenir en arrière », « si j’avais su » : le regret mêle lucidité et amertume. Et on se sent impuissant, fataliste. Or cet inconfort psychologique signale justement un refus de suivre une voie toute tracée. Reste à franchir les obstacles qui nous empêchent d’avancer, et c’est bien la mission des élixirs floraux que de nous y aider. Certains permettent de sortir de la mélancolie, source de désespoir. Ainsi, le chèvrefeuille s’adresse aux adeptes de la formule « c’était le bon temps ! » Ces nostalgiques ou les exilés souffrant du mal du pays pourront plutôt cultiver le passé comme le terreau du présent. On peut aussi se dire « il est trop tard ». Face à la sensation que les tourments d’hier sont un handicap, l’élixir de perce-neige aidera au lâcher-prise. Enfin, ce blocage peut s’installer suite à des événements dont nous n’avions pas mesuré l’ampleur des conséquences. Avoir eu un geste d’humeur qui a dégénéré en conflit familial, par exemple, crée un stress, voire un traumatisme. L’élixir d’étoile de Bethléem permet alors aux inconsolables de lever leur résistance au bien-être. Dans tous les cas, on peut ajouter des élixirs plus ciblés : l’amandier quand on regrette sa jeunesse à la première ride, le cœur-de-Marie si une rupture affective est en jeu (deuil, divorce, conflit) ou le myosotis quand on se sent abandonné suite à la perte d’un être cher. Penser aussi à l’élixir de marronnier blanc pour stopper les ruminations.
Mais le regret ne s’exprime pas seulement par la tristesse. Certains regardent dans le rétroviseur et s’enferment dans l’autocritique. Malgré tout, ceux qui s’en veulent en permanence en pensant qu’ils auraient pu mieux faire peuvent choisir l’élixir de pin. Celui-ci permet de se libérer de ses scrupules et de se pardonner au lieu de sombrer dans le remords et la dépréciation de soi. Nul n’est infaillible ! Et il est important de ne pas confondre ce que l’on a fait et qui on est. Plusieurs élixirs aident à faire ainsi la part des choses. Celui de mélèze permet de retrouver confiance en soi quand on a la sensation d’avoir été « nul ». L’hysope est indiqué lorsque le regret se nourrit de culpabilité. L’individu obsédé par l’idée d’avoir fauté porte un jugement sévère sur lui-même qui l’empêche de comprendre que ses actes ne le dévalorisent pas en tant que personne. Parfois, ce sont des attitudes qui nous donnent mauvaise conscience. Ainsi, certains regrettent de ne pas avoir eu une relation plus tendre avec leurs proches. L’élixir de tilleul pourra les aider à faire un pas vers l’autre tandis que le tournesol permet d’accepter de ne pas avoir eu des parents idéaux.
Certes, il est impossible de rejouer le film de sa vie. Mais en tirer des leçons permet d’exprimer de nouvelles potentialités. En séparant le bon grain de l’ivraie, on mesure avec plus de justesse les incidences réelles des événements ou des périodes que l’on regrette. Entrevoir une issue n’est pas toujours évident. L’élixir d’érable fournit un petit coup de pouce dans les périodes de stagnation. Quand le pessimisme et le scepticisme l’emportent, celui de gentiane apporte un soutien précieux. Considérer ses expériences comme une étape et non comme un échec donne le courage de continuer sa route. Mais il faut aussi éviter de répéter les mêmes erreurs. C’est l’élixir de bourgeon de marronnier qui favorise la clairvoyance et le travail sur soi pour ne pas tomber dans le piège des schémas répétitifs. Ce réajustement à la réalité implique une transformation de soi. Phase dans laquelle on peut retrouver un peu de sécurité en prenant l’élixir de mauve. Cette fleur aide notamment ceux qui ont du mal à faire le deuil de leur jeunesse.
Au fond, les regrets ne sont pas si négatifs tant qu’ils ne nous confinent pas au désespoir. Laissons-les nous immobiliser entre le passé et le futur… juste le temps de réfléchir un peu pour s’engager sur une meilleure voie.