Le jardin du Val Rahmeh - Merveilleuse confusion exotique
« Ma ville est un jardin ». C’est le slogan qu’a choisi Menton pour promouvoir la bonne demi-douzaine de jardins qu’elle abrite. Avec son microclimat unique en France, la station balnéaire représente un must en matière de diversité exotique. À ce titre, le jardin botanique exotique du Val Rahmeh est une étape incontournable sur la Riviera française.
Un voyage sous les tropiques, ça vous tente ? Pour ce faire, nul besoin de traverser les océans. À Menton, dernière ville de la Côte d’Azur avant l’Italie, bambous de Chine et lotus indiens, faux kapokiers du Brésil, palmiers d’Australie et du Mexique, arbres à cannelle de Cayenne et autres fougères de l’île Maurice poussent avec exubérance, notamment dans le jardin botanique du Val Rahmeh. Ici, mieux vaut préférer les circonvolutions poétiques aux allées bien rangées, le plaisir du ressenti aux apprentissages savants, et aimer les récits de ces illustres Britanniques qui firent la gloire de la Riviera française après les Russes blancs au début du XXe siècle.
L’histoire du jardin débute en 1905 quand un général de sa gracieuse majesté s’installe sur la Riviera qui lui rappelle Malte dont il fut gouverneur. Dans un lieu tout proche de celui où la reine Victoria a ses habitudes, surplombant la mer et la vieille citadelle de Menton, Sir Percy Radcliffe agrandit une vieille bâtisse provençale et y plante une superbe allée de palmiers Caryota, qui accueillent toujours les visiteurs. Les propriétaires qui lui succèdent sont aussi des amoureux d’espèces rares, à l’image d’une très originale lady, Miss May Campbell, qui y vécut dans les années cinquante. Botaniste de formation, elle y collectionne les solanacées, particulièrement les daturas, d’où son surnom de Dame aux daturas. Un très gracieux fouillis végétal s’installe alors. « Il n’a jamais vraiment disparu depuis ! », sourit l’un des jardiniers.
Vendu en 1966 à l’État, désormais sous le contrôle du Muséum national d’histoire naturelle, le jardin...
s’est diversifié et a obtenu le label Jardin remarquable en 2014. « Ce n’est pas un jardin d’étiquettes et il faut se laisser le plaisir de redécouvrir ici ou là des espèces qui ne sont étiquetées qu’une seule fois », précise sa directrice Sylvie Flamand. Sur plus d’un hectare cohabitent ainsi près de 1 500 taxons. Ici, une mini jungle tropicale ; là, le coin des cactus et celui des daturas, des bougainvilliers rouges et des érythrines ; là encore, les agrumes et les plantes médicinales : goyaves, bananiers des sages, acérolas, avocatiers, sapotes blanches, safran, lemongrass, cardamome, aloe vera, arganiers. En contrebas, un beau bassin permet d’admirer lotus et nénuphars, dont le nénuphar très rare victoria d’Amazonie (Victoria amazonica ou Victoria regia), surnommé ainsi en hommage à la reine Victoria. Une merveille qui atteint dix centimètres de haut et deux mètres de diamètre en août.
Avec sa situation côtière idéale, ce « vallon de la tranquillité » (signification de rahmeh dans la tradition arabo-persique indienne) est à la fois protégé des vents, hydraté par la mer et tempéré par une grande douceur, avec une moyenne annuelle de 16 degrés. « Toute l’année, il y a abondance de couleurs et de fragrances», résume Sylvie Flamand. Ainsi, après l’explosion du grand lilas perse (Melia azedarach) au printemps savoure-t-elle à l’automne celle du Port Saint Johns creeper, une bignone rose (Podranea ricasoliana) originaire d’Afrique du Sud. En toutes saisons, plaisir des yeux, des sens et de la découverte sont au rendez-vous. Si vous avez le temps, poursuivez votre balade dans le parc attenant du Pian et ses oliviers pluricentenaires. Leur alignement plutôt zen calmera les sens sollicités par l’exubérance du Val Rahmeh.
Sauver le Sophora de l’île de Pâques
Au Val Rameh, le Muséum, dont l’une des missions est la conservation d’espèces rares ou exceptionnelles, tente de sauver le Sophora toromiro, petit endémique de l’île de Pâques, d’où il a totalement disparu. Les anciens insulaires s’en servaient notamment pour créer des statues et des objets magiques ou sacrés. À la fin des années 1950 heureusement, le dernier et unique spécimen a permis à des botanistes suédois de prélever des graines mises en culture dans divers lieux du monde. Le Val Rahmeh est le seul jardin de l’hémisphère nord où l’arbre est en pleine terre, non sans difficulté, même si des « petits » sont nés. Un champignon qui protégerait ses racines semble manquer pour le rendre plus résistant. Les études se poursuivent en vue de sa réimplantation sur l’île. Certes, le Sophora n’est pas impressionnant mais, se réjouit la directrice du jardin, « il attire les visiteurs à qui on peut rappeler l’obligation du respect de l’écologie ». De fait, sa surexploitation, l’arrivée de moutons et des changements de mœurs ou d’alimentation sur l’île de Pâques ont en effet signé son (quasi) arrêt de mort.
Comment y aller
Renseignement Du 1er mai au 31 août, de 10 h à 12 h30 et de 15 h 30 à 18h30. Du 1er septembre au 30 avril, de 10 h à 12 h 30 et de 14 h à 17 h. Fermé le mardi. Visites guidées avec jardinier sur réservation. www.mnhn.fr/
Tarifs plein tarif : 6,50 €, tarif réduit : 5 €
Adresse Av. St Jacques, 06500 Menton. Tél.: 04 93 35 86 72
Y aller Le jardin botanique exotique du Val Rahmeh est à cinq minutes à pied du port de Garavan. Se garer en contrebas car la route qui y mène est un cul-de- sac. Pour se rendre au parc de Pian, monter l’escalier face à la sortie du jardin. En passant la frontière italienne, vous pourrez visiter le jardin botanique Hanbury à Ventimiglia.
En train Gare de Menton-Garavan.
Hébergement La Vela, chambres d’hôte au village pitoresque de Peille. De 75 à 110 euros, petit- déjeuner inclus. Tél. : 06 46 59 36 59 www.peillelavela.com