Un herboriste pharmacien à nouveau condamné par la justice
L’herboristerie de Châtellerault dans la Vienne (86) a été condamnée jeudi 30 juin par la justice pour exercice illégal de la pharmacie. Problèmes d’allégations de santé pour des plantes pourtant autorisées à la vente et aux vertus reconnues, problèmes concernant les périmètres respectifs des compléments alimentaires, des plantes vendues en vrac, et de celles relevant ou non du monopole pharmaceutique… Une condamnation qui pose à nouveau la question récurrente : est-il possible d’exercer le métier d’herboriste aujourd’hui ?
L’herboristerie Larmignat est une institution pour Châtellerault (Vienne) et sa région. Fondée en 1934 par Alfred Larmignat, quand le diplôme d’herboriste existait encore, elle est tenue depuis 2005 par Jean-François Cavallier, pharmacien diplômé. C’est ce dernier qui vient d’être condamné pour exercice illégal de la pharmacie à 3000 euros d’amende, dont la moitié avec sursis. Il devra aussi verser 1000 euros de dommages et intérêts au Conseil de l’Ordre des pharmaciens, constitué en partie civile, qui en demandait 10 000. Cette condamnation illustre une fois de plus le contexte difficile dans lequel évoluent ceux qui sont convaincus de l’intérêt des plantes médicinales et qui veulent exercer le métier d’herboriste. On lui reproche en effet de vendre certaines plantes, comme l’harpagophytum, relevant du monopole de la pharmacie.
Les herboristes dans le collimateur de l’Ordre des médecins
« Ce qui est aberrant aujourd’hui, c’est qu’un pharmacien compétent en plantes ne peut pas s’installer en dehors d’une officine classique, c’est-à-dire une officine qui vend aussi des médicaments allopathiques », explique Jean-François Cavallier. Cet homme de 63 ans a pourtant toutes les compétences requises : non seulement il est pharmacien diplômé, mais il enseigne par ailleurs la phytothérapie aux pharmaciens et médecins dans le cadre d’un DU de l’université de Tours. Autrement dit, la question n’est pas de savoir si le pharmacien Jean-François Cavallier est compétent ou non pour donner des conseils de phytothérapie, mais de l’autoriser ou non à ne vendre que des plantes.
« En fait, le Conseil de l’Ordre est opposé au développement de pharmacies-herboristes. Je ne comprends pas une telle opposition, car cette approche pourrait avoir un impact globalement très positif en matière de santé publique », poursuit-il. Autre paradoxe, en l’état actuel de la réglementation, il n’aurait pas été inquiété s’il avait vendu ses gélules d’harpagophytum sous la forme de complément alimentaire. Ce que Jean-François Cavallier dénonce aussi : « Vendre un complément alimentaire est pour moi une démarche très différente de celle consistant à mettre en avant des plantes médicinales avec une action thérapeutique assorties d’un conseil que je donne au comptoir. »
Il est vrai que le pharmacien a aussi marqué des allégations sur certains de ses mélanges de plantes. « Même pour une simple tisane à base de ronce, de rose, d’erysimum, de coquelicot et de mauve, je n’ai pas le droit de marquer qu’elle est conseillée en cas d’angine », explique-t-il. Comment vendre des plantes dans un tel contexte ? La question est une fois de plus posée par ce nouvel épisode du feuilleton kafkaïen auxquels sont toujours confrontés ces spécialistes des plantes et de la santé. Quant à Jean-François Cavallier, herboriste convaincu, il ne souhaite pas en rester là et fera appel du jugement.