Bernard Descottes, le miel et le scalpel
Référence internationale en chirurgie digestive, le Pr Descottes a été le premier Français à oser utiliser le miel à l’hôpital. Grâce à son association, et malgré sa disparition précoce en 2009, son combat pour promouvoir l’extraordinaire potentiel thérapeutique des produits de la ruche perdure.
Le lien entre un chirurgien et le miel n’avait rien d’évident dans les années quatre-vingt, et même encore aujourd’hui. Bernard Descottes avouait d’ailleurs que, plus jeune, les abeilles l’effrayaient terriblement. Mais le professeur aimait la nouveauté et n’hésitait pas à prendre des risques. En 1986, il crée une unité de chirurgie en transplantation hépatique et réalise la première opération chirurgicale française ex vivo du foie. Pionnier dans l’utilisation des techniques chirurgicales de pointe comme l’endoscopie, il réalise également en 1996 la première hépatectomie française sous cœlioscopie.
De la part d’une telle sommité, s’intéresser à un produit comme le miel pourrait paraître anachronique. Mais une discussion sur le pouvoir cicatrisant du sucre avec un ami biologiste le met sur la voie en 1984 : celui qui avait pour devise « j’y crois et je vous le prouve » décide alors de tester le miel dans son service, supposant que «les substances spécifiques à chaque fleur auraient peut-être aussi une action». Et peu importe que ce type de protocole ne soit pas forcément bien vu par l’hôpital.
Une cicatrisation spectaculaire
Le...
premier essai se fait sur l’abcès purulent d’une jeune patiente atteinte par une grave pathologie viscérale. À la surprise générale, la plaie cicatrise en huit jours ! Une réussite qui pousse le Pr Descottes à se lancer dans une vaste étude portant sur 500 patients atteints de plaies digestives, d’ulcères variqueux ou d’escarres. Les résultats sont probants : dans 90 % des cas, la cicatrisation se fait de façon spectaculaire, deux fois plus vite qu’avec les produits classiques. Plusieurs variétés de miels sont alors testées. Les soignants commencent par du miel toutes fleurs enrichi en châtaignier, puis le miel de thym s’impose comme le plus efficace, notamment grâce à sa puissante action antibactérienne. Tout le service du Pr Descottes va alors utiliser l’apithérapie pendant 25 ans sur plus de 3 000 patients.
Bien que cette pratique se fasse en dehors de tout cadre, l’administration hospitalière laisse faire, exigeant simplement un accord préalable des patients. Le scientifique constitue alors une équipe de chercheurs afin d’étudier le mode de fonctionnement du miel et comparer son efficacité sur plusieurs souches de bactéries. Il s’intéresse également aux autres produits de la ruche comme la propolis : ses vertus immunostimulantes sont selon lui largement sous-employées, notamment en cancérologie.
Celui qui créera en 2008 l’Association francophone d’apithérapie trouvera aussi le temps de s’engager dans le bénévolat pour former des chirurgiens au Vietnam, au Togo, au Burundi et en Roumanie. Depuis sa disparition en 2009, le personnel de son service continue son combat. D’autres hôpitaux comme celui de Bordeaux lui ont même emboîté le pas.
Bernard Descottes
1943 Naissance à Dijon.
1970 Entre à l’hôpital Dupuytren, CHU de Limoges.
1984 Premier essai de cicatrisation avec le miel.
1993 Nommé chef du service de chirurgie viscérale et transplantations.
1995 Fondation de l’Association de développement de la chirurgie au Vietnam.
2008 Création de l’Association francophone d’apithérapie (AFA).
2009 Décès à Limoges.
Héritage
L’Association francophone d’apithérapie Études scientifiques à l’appui, l’AFA promeut l’utilisation de l’apithérapie dans les milieux médicaux et montre à quel point les produits de la ruche (miel, pollen, venin d’abeille, propolis) se révèlent efficaces en cas de cancer, de maladie de Parkinson, de problèmes immunitaires... Le 3e Congrès international d’apithérapie se tiendra à Paris le 22 novembre prochain. Il rassemblera chercheurs, médecins, soignants et apiculteurs du monde entier.
apitherapiefrancophone.com