Les bettes : légume aux multiples bienfaits
Légume très populaire au Moyen Âge, la bette, ou blette, est appréciée des cardes aux feuilles pour sa délicate saveur végétale et terreuse teintée d’amertume. D’un faible apport calorique, riche en fibres, en sels minéraux et en vitamines, cette alliée revitalisante est à découvrir alors que nous glissons doucement vers l’automne.
Jusqu’aux premières gelées, ses bottes généreuses ornent les étals des marchés d’automne. Mais, hormis en Corse et dans la région niçoise où ce légume- feuille est emblématique de la gastronomie locale, la bette se fait plutôt discrète. Dans l’engoue- ment récent pour les légumes anciens, elle gagne à être mieux connue, et tout d’abord en dissipant le ou autour de son nom. Car Beta vulgaris var. cicla, plante bisannuelle de la famille des Chénopodiacées, appartenant à la même espèce que les betteraves dont elle est cousine, brouille les pistes. Elle se fait aussi appeler blette (dans le Sud), bette à carde, côte de bette, carde, blea (Nice), joutte ou joute (Bordelais, Charente, Poitou) ou jotte (Vendée) et même cardon, au risque d’une confusion gênante. Mais c’est son appellation de poirée qui retient l’attention, en lien avec le Moyen Âge, époque à laquelle le légume était omniprésent. Ainsi, vers l’an 800 de notre ère, Charlemagne recommande dans le capitulaire De Villis sa culture dans les jardins et les monastères. La bette constitue alors, avec le poireau, l’ingrédient principal des « porées », soupes claires de hachis de légumes et d’épices, facilitant la digestion des mets riches en viandes faisandées. Elle prend alors le nom de poirée, terme désignant aussi un légume en général.
Deux recettes pour une botte
Déroutante dans ses appellations, la bette l’est aussi dans ses saveurs, typiquement automnales. Les amateurs apprécient la dominante terreuse, de ses pétioles appelés cardes ou côtes, lesquelles côtoient l’amertume des feuilles. Les autres font la grimace en évoquant soit sa fadeur, soit un goût de terre trop prononcé. À cette incertitude gustative s’ajoute une autre hésitation: comment donc la préparer? Pourtant, la bette s’offre entièrement en cuisine, cardes et feuilles confondues, ces dernières étant hélas trop souvent écartées dans certaines régions...
La tradition dit que l’on peut préparer deux plats avec une seule botte. On utilise d’une part les côtes, parfois rouges ou jaunes selon les variétés, cuites à la vapeur, sautées avec de l’huile d’olive ou apprêtées en gratin. Puis les feuilles sont préparées comme les épinards, cuites à l’étouffée, servant de base à une tarte, un an, un potage, une farce, ou agrémentant une omelette. Elle se consomme cuite, à l’exception de Beta vulgaris var. maritima. Cette variété sauvage de bettes, poussant en terrain sableux sur les littoraux, est appréciée pour ses petites feuilles charnues lancéolées, agrémentant délicieusement une salade d’herbes fraîches.
Indications et contre-indications
Probablement originaire d’Europe de l’Ouest et du bassin méditerranéen, domestiquée par les Celtes 2000 ans avant J.-C., la bette fut utilisée au l des siècles pour ses vertus émollientes, en cataplasme sur les dartres et les croûtes de lait. Roques et Cazin, deux phytothérapeutes du XIXe siècle, la recommandaient pour soulager les inflammations urinaires et la gravelle, ou calculs rénaux. Une indication qui peut sur- prendre, car en contradiction avec l’approche moderne, préconisant une consommation modérée de bettes pour ces mêmes pathologies. En cause, la présence importante d’acide oxalique, ou oxalates, dans le légume, tout comme dans l’oseille. Composé toxique, l’oxalate est susceptible de s’allier au calcium en milieu acide, comme l’urine, et de se cristalliser sous forme de calculs, provoquant une lithiase biliaire. Mais c’est pour son effet laxatif que la bette est certainement la plus réputée.
L’histoire raconte qu’un potage de bettes cuites avec de la grande mauve (Malva sylvestris >), également purgative, infligea à Cicéron une diarrhée de dix jours! Loin de ces excès, dans le cadre d’une consommation équilibrée, la bette soulage tout en douceur des constipations légères grâce à sa teneur en fibres. À noter que si les cardes sont très landreuses, il vaut mieux les casser à leur base et les éplucher comme le céleri-tige, a n de préserver les intestins fragiles. Alliée des régimes minceur en raison de son très faible apport calorique (25 kcal aux 100 g) – à condition toute- fois de ne pas la noyer sous des nappes de béchamel ou de crème –, la bette apporte une quantité précieuse de vitamines et de sels minéraux. Ainsi, une portion de 200 grammes de feuilles de bettes cuites couvre plus de 100% des apports conseillés en bêta-carotènes, ou provitamines A essentielles à la vision, à la croissance et à la santé des os et des muqueuses. Véritable légume anti-anémie, précieux allié lors du changement de saison automnal et la fatigue souvent inhérente, la bette affiche une forte teneur en magnésium, favorisant le bon fonctionnement des muscles, du cerveau et régulant l’humeur. Elle est aussi une source très importante de fer, constituant des globules rouges, indispensable au bon fonctionnement du système immunitaire. S’y ajoute la présence importante de vitamine K1, permettant la coagulation du sang, dont plusieurs études ont mis en avant la faculté d’augmenter la densité minérale osseuse et ainsi de diminuer le risque de fractures. À noter que la bette est conseillée aux personnes diabétiques. Elle permettrait en effet d’augmenter la production d’insuline, tout en protégeant le cœur, le foie et les reins des dom- mages causés par la maladie. C’est du moins ce qu’ont montré diverses études menées in vivo en laboratoire, avec des extraits de bette à carde. Soulignons en n qu’elle remporte la palme du légume le plus alcanisant, à quasi-égalité avec l’épinard. Sa consommation régulière, avec d’autres légumes et fruits, permet ainsi d’assurer un bon équilibre acido-basique de l’organisme, si précieux pour la santé. Parmi les multiples appellations des bettes, on trouve parfois à tort celle de cardon. En effet, Cynara cardunculus, plante potagère cousine de l’artichaut de la famille des Astéraceés, est botaniquement différente. Si ses côtes charnues se dégustent comme celles des bettes, ses feuilles ne sont pas comestibles en raison de leur forte teneur en oxalate. Même précaution à prendre avec la rhubarbe (Rheum rhabarbarum), parfois confondue avec les variétés de bettes à cardes rouges. POUR 3 À 4 PERSONNES 1. Préparer la pâte, mélanger les ingrédients à la main ou à l’aide de votre robot. Former une boule et conserver au réfrigérateur. 2. Faire cuire à la vapeur les feuilles de bettes. Cuire le riz. 3. Couper l’oignon et l’ail, les faire revenir dans une poêle, dans un peu d’huile d’olive. 4. Dans un grand bol, couper les feuilles de blettes grossièrement, mélanger à l’oignon et à l’ail, ajouter l’œuf, le fromage râpé et le riz cuit. Mélanger. Ajouter sel et poivre. 5. Étaler la pâte brisée. 6. Déposer un cercle dans votre moule. Bien garnir de farce. Recouvrir d’un second cercle de pâte (vous pouvez badigeonner les bords de la première pâte avec un peu de jaune d’œuf avant de déposer le second cercle). Badigeonner la pâte de jaune d’œuf à l’aide d’un pinceau. 7. Enfourner à four chaud pendant 30 minutes, jusqu’à ce que la pâte soit bien dorée. Notre conseil Dans la garniture, vous pouvez également ajouter quelques côtes de bettes coupées en petits morceaux. Retrouvez d’autres recettes de la cuisine de Josie sur son blog www.lacuisinedejosie.fr Variétés La bette-épinard (ou poirée verte à couper) est appréciée pour ses feuilles, que l’on récolte en périphérie de la rosette et qui repoussent au centre. La poirée verte à carde blanche est appréciée pour ses côtes très larges. Les côtes décoratives roses, rouges et jaunes de la poirée bright lights égayent les jardins et sont bonnes à déguster, mais les couleurs disparaissent à la cuisson. La poirée blonde à cardes blanches offre un bon équilibre entre feuilles et cardes. POUR 4 PERSONNES Réalisation 1. Faire tremper les noisettes et les raisins dans un grand bol d’eau. 2. Laver les blettes, séparer le vert des côtes. Couper les côtes en petits dés et émincer le vert finement. 3. Éplucher l’ail et l’oignon et les émincer. Dans une poêle, faire revenir doucement l’ail et l’oignon. 4. Au bout de 3 minutes, ajouter les côtes de blettes et le cumin. Couvrir et cuire 5 minutes. 5. Ajouter en n le vert de blettes et prolonger la cuisson douce à couvert pendant 5 minutes. 6. Dans un robot mixeur, mélanger le contenu de la poêle, la farine de sarrasin et les deux œufs. Saler et poivrer. 7. Chemiser des moules individuels et y verser la préparation. Cuire à la vapeur pendant 15 minutes. 8. Préparer la sauce en mixant finement les noisettes et les raisins soigneusement rincés. Ajouter juste l’eau nécessaire pour obtenir une sauce onctueuse qui nappe une cuillère. 9. Servir les terrines accompagnées de cette sauce et d’une salade. Recette proposée par Amandine Geers et Olivier Degorce dans le livre « Les recettes du régime IG », Éd. Thierry Souccar. La bette est le légume emblématique du patrimoine culinaire niçois, si bien que leurs habitants, appelés « Nissarts » en patois local, étaient autrefois affublés du sobriquet de « cagueurs de blettes ». Le légume-feuille était si omniprésent sur leurs tablées que cela se ressentait sur leur transit intestinal ! Dans cette région longtemps italienne, elle a bénéficié de l’influence de sa gastronomie, accordant une large place à ce légume. Elle est aujourd’hui au cœur d’un étonnant dessert sucré-salé dénommé « torta de blea ». Faisant la fierté de ses habitants, cette tourte associe bettes, parmesan, raisins secs et pastis ! On en retrouve partout, des supermarchés aux pâtisseries chics. Les meilleures recettes se transmettent de génération en génération. Testez la version de Camille Oger sur son blog www.lemanger.fr. Une alliée en automne
N’est pas bette qui le souhaite !
Tourte aux bettes salées
Pâte brisée 150 g de beurre à température ambiante • 1 œuf • 300 g de farine • 2 c. à soupe d’eau • Sel, thym et piment d’Espelette.
Garniture 350 g de feuilles de bettes • 1 oignon • 1 œuf • 25 g de riz • 50 g de fromage râpé (comté ou emmental) • 1 gousse d’ail, sel, poivre • Pignons de pin (facultatif).
Réalisation Mode d’emploi
Choisir et conserver
À l’achat Choisissez les bettes aux feuilles colorées, souples, fermes, luisantes, non jaunies ou flétries. Les côtes doivent être dénuées de taches noires ou brunes à leur base, signe d’oxydation.
Conserver Les bettes se conservent au frigo enveloppées dans un linge légèrement humidifié pendant quelques jours. Il est possible de blanchir les feuilles (2 minutes) et les cardes (3 minutes) dans l’eau bouillante, séparément, pour les garder plus longtemps avant de les manger ou les congeler.Petites terrines de blettes sauce noisette et raisins secs
Ingrédients 6 belles feuilles de blettes • 2 gousses d’ail • 1 oignon • 2 c. à soupe d’huile d’olive • 1 c. à café de cumin en poudre • 1 c. à soupe rase de farine de sarrasin • 2 œufs
Pour la sauce 15 à 20 noisettes • 2 c. à soupe de raisins secs.La torta de blea des Nissarts