Potager fruitier de La Roche-Guyon Réconcilier patrimoine et écologie
Le magnifique potager du château de La Roche-Guyon, conforme aux plans originaux du XVIIIe siècle, est aujourd’hui dédié à l’expérimentation horticole en agroécologie. Dans le département du Val-d’Oise, à moins de deux heures de Paris, partez à la découverte d’une riche biodiversité cultivée.
Ne vous fiez pas à la rigueur de son dessin, géométrique et symétrique : le potager du château de La Roche-Guyon, classé jardin remarquable, sort des lignes et expérimente les différentes pratiques qui font l’agriculture de demain : permaculture, agroforesterie, couverture permanente du sol, etc. Ces différentes approches agroécologiques sont expliquées au public par une riche signalétique. On y sème des variétés potagères anciennes, ainsi que des blés de pays afin de contribuer à leur conservation. Les plantes sauvages sont les bienvenues dans les parcelles : le pastel des teinturiers, les orchidées ou encore le bouillon blanc ne sont pas arrachés, ces espèces indicatrices témoignant des évolutions du sol ; des pancartes les signalent aux visiteurs. Quant aux récoltes, elles sont transformées en conserves – la confiture d’oignon vaut le détour.
Variétés anciennes
« Nous considérons le jardin comme un écosystème », précise Emmanuelle Bouffé, jardinière –paysagiste responsable de la gestion du potager. « Plus il accueillera de biodiversité sauvage et cultivée, plus il sera résilient. » En effet, face aux changements climatiques, les jardins doivent aujourd’hui pouvoir résister à des événements inattendus. Cette approche écologique a été amorcée en 2004, lorsque l’espace a été restauré après un abandon de plus de trente ans. Certes, une recherche historique a été menée pour que les trente-deux parcelles géométriques soient redessinées comme au XVIIIe siècle et que les variétés fruitières de l’époque soient retrouvées et replantées le long des allées : on dénombre ainsi environ 700 arbres, majoritairement des poiriers, d’où l’appellation de « potager fruitier ». Mais peu à peu, la priorité est devenue la recherche de pratiques douces pour l’environnement.
« Nous militons pour que la terre soit aussi considérée comme un patrimoine à préserver », déclare avec passion Emmanuelle Bouffé. Plusieurs analyses de sol ont été réalisées par les...
fameux agronomes Lydia et Claude Bourguignon, spécialistes de la vie souterraine. Car l’histoire de ce potager est avant tout liée à celle de sa terre : situé le long de la Seine, à 5 km de Giverny, le site a été surélevé pour être protégé des inondations. Pour cela, la belle falaise de craie dans lequel est incrusté le château de La Roche-Guyon a servi de remblais. Trois siècles de culture ont ensuite façonné ce sol potager. Mais lors de sa rénovation en 2004, la terre a été malmenée, enlevée pour une grande partie et ensuite remplacée par de la terre agricole de grandes cultures. Afin de reconstituer un sol potager, les paysagistes qui prennent le relais en 2008 choisissent des pratiques telles que la rotation des cultures, le paillage, le compostage des déchets verts, la préparation de purins d’ortie, de consoude ou de prêle, etc.
Ce jardin de quatre hectares offre une visite très agréable grâce à ses larges allées de sable et il procure une vue imprenable sur le château. On peut ensuite accéder, via le fantastique escalier creusé dans la craie, au donjon médiéval qui trône en haut de la falaise. C’est ainsi qu’on voit se dessiner les quatre carrés du potager, eux mêmes divisés en huit triangles. De ce point de vue exceptionnel, on peut aussi admirer le village de La Roche-Guyon, classé parmi les plus beaux villages de France – c’est d’ailleurs la seule commune francilienne à bénéficier de ce label. Il appartient aussi à la Réserve naturelle nationale des Coteaux de la Seine, créée en 2009 à l’intérieur du Parc naturel régional du Vexin : haut lieu d’herborisation aux environs de Paris depuis le XIXe siècle, La Roche-Guyon se retrouve sur le chemin de nombreux botanistes passionnés qui sauront aussi apprécier le potager du château cultivé dans le respect de la nature.
Comment y aller
En voiture depuis Paris, comptez une heure et demie en prenant l’A13 direction Mantes-la-Jolie centre, l’A15 direction Cergy-Pontoise puis la D14, la D86 et la D37.
En train au départ de gare Saint-Lazare, aller jusqu’à Mantes-la-Jolie, puis prendre le car Tim Bus, ligne 95- 11 (pour les horaires, tél. : 01 34 46 88 00 et www.transport-idf.com).
À pied à partir de la gare ferroviaire de Bonnièressur- Seine, suivre le GR2 sur les coteaux (le balisage est blanc/rouge). Comptez 1h-1h30 de randonnée jusqu’à La Roche-Guyon.
Pratique Le château et le jardin sont ouverts tous les jours de début février à fin novembre, visite guidée le dimanche à 15h ou sur réservation. L’accès au potager est gratuit.
Adresse et contact 1, rue de l’Audience, 95780 La Roche-Guyon, tél. : 01 34 79 74 42,
www.chateaudelarocheguyon.fr
Hébergement Les Damiers à La Roche-Guyon proposent des chambres d’hôtes à partir de 68 €.
Tél. : 06 10 14 94 25, www.les-damiers.e-monsite.com
Pédagogie et engagement social
Au potager du château de La Roche-Guyon sont organisés de nombreux ateliers pour enfants et adultes sur des thèmes comme les plantes qui soignent, la vie du sol ou les insectes. Par ailleurs, le jardin accueille un chantier d’insertion : depuis 2009, via l’association Vie Vert, il accompagne des personnes en recherche d’emploi qui, au travers du jardinage, accèdent à l’emploi durable. Les légumes récoltés partent à la conserverie coopérative de Marcoussis, autre chantier d’insertion professionnelle.
Ophrys petite araignée (Ophrys araneola)
Cette orchidée fait partie des huit espèces prioritaires de la Réserve naturelle nationale des Coteaux de la Seine qui s’étend sur les falaises calcaires de cinq communes, dont La Roche-Guyon. Lorsqu’elle s’invite dans le potager du château, les jardiniers protègent cette espèce en voie de disparition.
Prunellier (Prunus spinosa)
Au potager de La Roche- Guyon, on le trouve dans la parcelle « haie gourmande ». Ce type d’arbuste contribue à la biodiversité du jardin. En effet, le prunellier est l’hôte de nombreux insectes. En outre, les prunelles sont comestibles et les sommités des rameaux sont utilisées pour le vin d’épines.
Poireau perpétuel (Allium ampeloprasum)
Ce poireau de petite taille a des feuilles avec une saveur très fine aromatisant bouillons, sauces, salades ou omelettes. Comme son nom l’indique, le poireau perpétuel est vivace et permet des récoltes durant plusieurs mois. Il montre au public qu’il existe des cultures potagères nécessitant peu de travail.