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L ’autre nom des plantes

coquelicot

L’univers de la botanique est sur le point de connaître un véritable chamboulement. Des botanistes de Tela Botanica, association de référence, ont entrepris d’établir un troisième nom pour chaque plante. Mais au fait, au nom de quoi ?

Nommer correctement les plantes qui  nous  entourent.  Telle  est  la préoccupation de tous  ceux  qui s’intéressent  de  près  ou  de  loin au  végétal.  C’est  aussi  l’action  engagée  par quelques  botanistes  qui,  depuis  2011,  ont commencé à rebaptiser l’ensemble des plantes du  territoire  français.  Leur  objectif :  définir un  troisième  nom  « normalisé »  qui  viendra s’ajouter à l’appellation scientifique (en latin) et à celle vernaculaire (nom courant) qui n’est pas uniforme selon les régions et les usages.

Mais pourquoi  ajouter  un  nouveau  nom à  une  nomenclature  déjà  compliquée ?  Pour simplifier,  justement.  En France,  la  base  de données  nomenclature  de  la  flore  de  France (BDNNF) recense 95 005 noms pour  seulement 21 812  espèces,  variétés  et  hybrides.  Or les nombreux noms vernaculaires prêtent souvent à confusion. « Ce projet permet de faire un peu de ménage et de donner des noms français aux taxons [unité de classification du vivant, ndlr] qui n’en ont  pas », explique Daniel Mathieu, président du réseau Tela Botanica qui relève ce défi avec une trentaine d’autres botanistes.

6 000 taxons en trois ans

Oublié...

, le mouron rouge qui donne  parfois des fleurs  bleues. Lysimachia  arvensis  deviendra Mouron  des  champs  et  supplantera  les  six noms vernaculaires régionaux (fausse  morgeline, miroir du temps,  menuchon...). Cette démarche permettra aussi d’éviter les erreurs suite à de nouveaux travaux de taxinomie. « Contrairement au nom scientifique qui évolue dès que des études génétiques remettent en cause la classification [Papaver  cambricum va ainsi bientôt remplacer Meconopsis cambrica,  ndlr], ce  nouveau  nom ne  changerait  plus », détaille Daniel Mathieu. L’ ampleur  de  la  tâche  est  énorme. « C’est  un  travail  bénévole. J’ai  déterminé  6 000 noms  en  trois ans sur un peu plus de 20 000 taxons tandis qu’un autre membre du réseau détermine les noms des genres ».

Par ailleurs, l’ethnobotaniste Mélisse Durecu a travaillé trois ans pour publier en novembre 2014 une méthodologie. Selon  ce  guide,  chaque  espèce  sera dotée  d’un  premier  nom  relatif  au genre, le second étant un  qualificatif. Désormais,  notre  beau  coquelicot, (Papaver  rhoeas) se nommera  Pavot grand- coquelicot.  Les  autres  noms utilisés dans nos  campagnes  (coquelicot  douteux,  hybride,  argémone) tomberaient donc en désuétude. « Si je dis  coquelicot,  ce  n’est  pas  suffisant pour  savoir  de  quoi  je  parle »,  argumente le  président de Tela Botanica.

Si l’initiative semble fondée sur une ambition scientifique intéressante, le perfectionnisme de certains passionnés fait craindre une complexification générale. Mais les botanistes se donnent du temps. « Les noms seront intégrés petit à petit, déjà en les insérant sur le site de Tela Botanica, qui fait référence pour Wikipédia. Ensuite, ces noms pourront être introduits dans la loi puisque c’est une demande explicite du  ministère de l’Écologie que d’avoir un nom  commun », justifie Daniel Mathieu. À  voir  comment  tout  un  chacun pourra se les approprier. 

Selon la nouvelle nomenclature en train de se mettre en place, le coquelicot (Papaver rhoeas) s’appellera Pavot grand-coquelicot, tout comme ses nombreux hybrides. Quant au mouron rouge (Lysimachia arvensis) qui porte déjà de nombreux noms vernaculaires, il n’en gardera qu’un seul : Mouron des champs.

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