Dossier
Voyage au pays des épices qui soignent (7/7)
Un soupçon d’histoire, une pincée de botanique et une bonne dose de phytothérapie : on ne saurait parler des pouvoirs thérapeutiques des épices sans évoquer leur riche passé et sans s’émerveiller devant leurs formes végétales. Presque toutes sont dotées des propriétés digestives. Mais certaines se distinguent comme la cannelle, le curcuma, le clou de girofle et le safran, car leurs vertus les rendent indispensables aujourd’hui quand on veut se soigner par les plantes.
Le safran, des stigmates contre la déprime
On ne présente plus le safran, épice la plus chère au monde, issu des stigmates de Crocus sativus : au coeur de la fleur, ces filaments rouges servent à capter le pollen en vue de la fécondation. La plante serait originaire d’Asie Mineure, et des papyrus de l’Égypte ancienne montrent que l’épice qu’on en tire était employée par les pharaons pour la purification des lieux sacrés. En Orient, le safran symbolise la gaieté et la sagesse.
Son arôme subtil, il le doit à pas moins de 150 composés aromatiques volatils. Le safran est également une source de pigments caroténoïdes : zéaxanthine, lycopène, alpha- et bêta-carotènes, et surtout alphacrocine. Cette dernière, qui est présente à près de 10 %, lui donne sa couleur si particulière. Il renferme aussi du safranal, qui possède une activité sédative et contribue à son parfum. C’est ainsi que le safran agit sur le système nerveux : il est à la fois analgésique – il est recommandé en cas de règles et de gencives douloureuses – et tonique.
Et si l’on considère depuis fort longtemps que le safran...
apporte la gaieté, ce n’est pas sans raison. Des essais cliniques prouvent son action sur la dépression légère à modérée. Il n’existe actuellement en France aucun médicament à base de safran ayant obtenu d’autorisation de mise sur le marché. Mais on le trouve sous forme de compléments alimentaires à visée antidépressive, seul, associé au millepertuis ou à d’autres actifs.
Le safran a été aussi étudié comme anticancéreux en lien avec ses propriétés antioxydantes. In vitro, il a été démontré qu’il est actif sur les cellules malignes, prévenant leur prolifération. Il agirait également au niveau de la sphère intime. Il traiterait en effet la sécheresse vaginale et le manque de désir, ses vertus aphrodisiaques reposant sur sa teneur en phytostérols.
Il ne faut pas abuser du safran : au-dessus de 10 grammes par jour (2 cuillerées à café), il provoque une paralysie du système nerveux, avec perte de connaissance. De toute façon, son prix est un facteur limitant ! Ses stigmates sont cueillis à la main et il faut environ 200 fleurs pour obtenir un gramme du précieux ingrédient ! Si la plupart des épices se sont démocratisées dans la cuisine, pour leurs propriétés thérapeutiques on aura à coeur de choisir le meilleur.
L’Inde protégée par le crocus
Une légende raconte qu’Alexandre le Grand, en pleine conquête du Cachemire, fit une rencontre décisive avec le safran. Il avait établi un campement dans une prairie, un soir d’automne. Or, au matin, le roi et son armée se réveillèrent au milieu d’un océan de fleurs mauves, apparues subitement pendant la nuit. Voyant dans ce spectacle impressionnant un mauvais présage, Alexandre donna l’ordre du retour et mit un terme à sa conquête de l’Inde. Il consommait pourtant du safran dans son thé et en parfumait son bain, voyant dans cette épice un remède pour accroître le courage.
Un antidépresseur naturel
Plusieurs études indiquent que la consommation de safran permet d’atténuer significativement les symptômes de la dépression. Ses principes actifs, le safranal et la crocine, inhibent la recapture de la dopamine et de la sérotonine, hormone de la bonne humeur.
En pratique
• Choisissez des compléments alimentaires apportant environ 30 mg par jour.
• En teinture-mère, on conseille 50 gouttes matin et soir diluées dans une infusion de valériane ou de mélisse.